Laponie
Z'êtes prêts pour le roman ? Z'êtes prêts pour le roman.
Il était une fois, en Laponie Finlandaise...
Non, pardon. Il était une fois, à Helsinki, un groupe d'étudiants Erasmus qui décidèrent de partir à la découverte de la Laponie. Les pauvres ne se doutaient point de ce qui les attendait : un très, très, très long voyage en bus de près de 24h.
Et oui, nous montâmes dans le bus à Rautatientori au centre d'Helsinki à 21h jeudi et arrivâmes à Saariselkä, en Laponie, le lendemain à 20h. Bien sûr, il y eut des pauses. La première vers 1h du matin, pour une durée de 45 minutes. Jusque là, ça va. Zioup, retour dans le bus et rebelote. Pause suivante aux alentours de 5h du matin, si mes souvenirs sont exacts - ce dont je doute. De nouveau 45 minutes de pause. Et hop, on remonte à bord... Jusqu'à ce que l'on arrive, à 10h le lendemain, vendredi donc, au Rauna Wildlife Park pour une pause animalière cette fois. Pas bêtes, on s'habille bien chaud, les paysages sont tout blancs, ça y est, ça commence à devenir irréel. Le Rauna Wildlife Park, donc, qu'est ce que j'en retiens - à part que non, décidément, je n'aime pas les animaux en cage ? Que les français ont fort bien fait de ne point traduire le nom de Wolverine dans les X-men, parce que j'en ai vu un de wolverine. Alors d'une part, c'est petit, moche, et teigneux, et d'autre part, le nom français, c'est glouton. GLOUTON. Vous imaginez un peu...
Bref, à midi, back in the bus, et roulez jeunesse, prochaine pause à.. Rovaniemi, le village du père Noël. Nous y arrivons vers 15h. Une rangée de poteaux nous indique que ça y est, nous avons franchi le cercle polaire - le point à partir duquel le soleil, en été, ne se couche pas pendant au moins 24h et en hiver, ne se lève pas pendant au moins 24h. Et comme c'est un peu bête de passer devant le bureau de ce bon vieux Santa sans aller lui taper dans l'dos, nous ne dérogeons pas à la règle et débarquons à 50 Erasmus pour faire une photo avec lui. Oui, oui, il a tenu à serrer la main à chacun d'entre nous. En partant, il nous a lancé un "n'oubliez pas ! Nous nous reverrons dans 19 jours !" - nous étions le 6, je vous laisse faire le calcul. Moi qui ne sautais pas spécialement de joie à l'idée de visiter Rovaniemi, qui ne suis pas spécialement convaincue par la magie de Noël (bien que j'en adore l'atmosphère), je dois avouer qu'à ce moment là, j'ai eu envie d'y croire - et je crois bien que j'y ai presque cru.
Cherchez l'intru. [Indice : il a une longue barbe et il est au milieu.]
Il nous restait ensuite une heure et demie de temps libre sur place. Il était grand temps de nous restaurer ! Alex et moi, après avoir envoyé quelques cartes postales qui seront estampillées « Santa Claus’ Office », sommes attirées par une espèce de tipi. Nous y rentrons et découvrons que l’on peut y manger un repas lapon traditionnel : du saumon cuit sur le feu, avec une petite salade et un pain. Sans mentir, la cuisson la plus rustique possible pour le meilleur saumon que j'ai jamais mangé.
Le tipi-resto.
Retour dans le bus pour les derniers 300 kilomètres jusqu’à Saariselkä, où nous logerons. Arrivés à destination, gelés et crevés (oui, 1h30 de sommeil au total divisée en plusieurs fois 20 minutes, j'étais un peu, seulement un tout petit peu, fatiguée), nous rejoignons nos cottages pour nous installer et hop, nous ressortons directement pour essayer de voir une aurore boréale. Echec : rien pour cette nuit. En plus, ne connaissant pas le chemin jusqu’à la colline, nous avons coupé à travers champs et nous nous sommes retrouvés à devoir traverser des étendues où la profondeur de la neige devait atteindre une soixantaine de centimètres, voire plus : un pas et bim ! enfoncé dans la neige jusque mi-cuisses.. Bref, on avait plus vite fait d’avancer à quatre pattes, notre poids étant réparti, on ne s’enfonçait que peu. C'était super rigolo mais pas super pratique. Arrivés en haut de la colline, rien du tout. Ciel nuageux, pas l’ombre d’une aurore boréale. MAIS ON S'EN FOUT ON EST EN LAPONIE !!!
Samedi matin, départ du bus à 6h30 pour la Norvège. Lever aux aurores (Ah ! Ah !), donc, et c’est parti. Nous faisons une pause à Näätämö, tout au nord de la Laponie, à quelques centaines de metres de la frontière avec la Norvège. Tout au long de la route, à part quelques rennes, nous n’aurons rien croisé : désert. Après encore une ou deux heures de bus, nous arrivons à Pykeija, énorme métropolis norvégienne de .. 200 habitants. Les paysages sont à couper le souffle. A quelques mètres du bras de mer, un sauna public se dresse, et nous sommes accueillis par sa propriétaire, qui nous dit deux trois mots sur l’histoire du village et nous explique que se baigner ici est vraiment bénéfique sur la santé car l’eau est extrêmement chargée en minéraux. Ensuite, début des hostilités, il est temps de se presser dans le sauna pour emmagasiner quelque chaleur avant le grand saut. Bon, 40 personnes compressées dans un sauna, je vais vous épargner le dessin, mais c’est rigolo. Puis, pas le choix, il va bien falloir y aller un jour ou l’autre.. C’est parti, en maillot de bain, nous traversons la neige, puis les rochers, puis enfin, la plage pour se jeter dans l’eau et retourner au sauna le plus vite possible. Nous nous rechargeons en chaleur et retournons à l’eau.. Retour au sauna.. Retour dans l’eau.. et dernier retour au sauna car la condition de nos orteils est en jeu, et bien que des scientifiques aient prévu que nos petits orteils allaient disparaitre aux cours des années à venir, personnellement, moi j’en ai et j’y tiens. Les paysages, vraiment, étaient fabuleux et je ne saurais trouver les justes mots pour les raconter, vous allez devoir faire avec les photos, qui sont malheureusement vraiment peu parlantes.
Pykeija, Norvège, où l'on s'est baignés.
PREUVE.
Bref, retour dans notre cher bus et après environ une heure de route, nous nous arrêtons manger une soupe quelque part en Laponie, toujours en Norvège. Genre la meilleure soupe du monde, avec du poisson pêché le matin même.
Enfin, retour à Saariselkä vers 20h et groooos dodo.
Nos cottages !
Arrive dimanche. Rien de prévu avant 15h30, heure à laquelle nous avons rendez-vous pour partir visiter une ferme de rennes, à quelques minutes de là. Ferme est, à mon sens, un bien grand mot, et vous saurez pourquoi dans quelques lignes. Nous sommes accueillis par Visa (« yes, like in Visa CaRRRd, easy ! »), le propriétaire des lieux. En premier nous faisons un petit tour dans des traineaux (un renne pour un traineau, deux personnes par traineau), puis, après être complètement frigorifiés (c’est pas qu’il fait -30 depuis le début du séjour, mais bon), nous sommes conviés dans la « Kota », sorte de tipi en bois où il fait tout noir mais où il y a un grand feu, pour se faire griller deux saucisses (enfin.. pas pour tout le monde, quoi) et boire des boissons chaudes. Ensuite Visa nous a longuement parlé de son activité. Si mes souvenirs sont exacts, la Laponie est divisée en 56 régions pour les rennes. Au sein de chaque région, les différents éleveurs travaillent main dans la main et reconnaissent quels sont leurs rennes suivant les entailles dans leurs oreilles. Les rennes sont en liberté et ne sont pas domestiqués : ils sont à demi sauvages. C’est pour ces deux raisons que je ne suis pas convaincue par le terme « ferme », mais passons. Tout est bon dans le renne, si je puis dire : la peau, la viande, les bois, les os, le lait.. Tout est utilisé – d’un coté, ils n’ont que ça. Donc Visa protège vaillamment ses rennes, été comme hiver, les ours, des loups, des renards et autres gentilles bestioles (vous vous souvenez du glouton ? C'est là qu'il revient !). Ils nous a également expliqué les subtilités des costumes Sami. Les Sami sont les habitants de la Laponie et ils existe trois « nations » de Sami. Le terme Sami est l'équivalent de "lapon", dans leur langue. Il faut savoir que les Sami préfèrent ce premier terme à ceux de Laponie / lapon / ... car ces derniers viennent du suédois "lapp" signifiant "haillons". Lapland, donc, en gros, ça signifie "terre des gueux" quoi. Bon, là je m’embrouille un peu mais en gros il y a les Sami du nord (Finlande/Norvège), les Sami d’un peu en dessous, et les Sami d’encore au dessous. Oui, vous adorez mes explications. Bref, ces trois peuples sont des Sami, mais ils n’ont ni la même langue (ils doivent passer par le finnois pour se comprendre), ni les mêmes costumes. Visa nous a donc expliqué ce que signifiait le sien. Chaque couleur représente un élément propre à celui qui le porte : le jaune représente le soleil, très important dans ces endroits, le rouge représente le feu, sans qui toute vie leur serait impossible, le vert représente la forêt – ainsi un éleveur de renne ne vivant pas en forêt de portera pas de vert sur son costume. Le costume comporte aussi une espèce de chapeau, d’où pend un.. truc. Bref, l’important c’est que si ce truc pend à gauche, le porteur du costume est célibataire, et s’il pend à droite, il est marié. Il y a plein d’autres subtilités mais l’important est de retenir que pour quelqu’un qui a l’œil, pas besoin de parler pour tout savoir de quelqu’un. Enfin, une femme nous a chanté a cappella un chant Sami, magnifique. Visa était accompagné de son bambin qui ne devait pas être âgé de plus d’un an, ce qui m’a menée à la question suivante, en le voyant « qu’est ce que c’est, pour un enfant d’aujourd’hui, de naitre en Laponie, dans un élevage de renne sans rien aux alentours ? »
Désormais, je n'irai à la fac que si c'est ce chouette mammifère qui m'y emmène.
En bref, cette journée a été incroyablement enrichissante.
Et en sortant de la kota, surprise ! Aurore boréale ! Tadam ! De retour au cottage, nous nous somme remis à la chasse aux aurores, bien plus fructueuse que précédemment !
Lundi était notre dernier jour entier. Nous devions décoller à 9h30 pour aller visiter un élevage de huskies non loin de là. Arrivés sur place, à peine sortis du bus, nous étions déjà complètement congelés. Soulagement donc quand une des personnes nous ayant accueillis nous emmène dans une espèce de petite cabane au centre de laquelle deux feux brûlaient. Du feu ! De la chaleur ! Alléluia !
...
Raté, la température à l'intérieur était négative elle aussi, et malgré le glögi brûlant qui nous a été servi, nous refroidissions à vue d'orteil. Tout s'annonçait plutôt mal. Cependant, nous ignorions que des tenues seraient mises à notre disposition, qui nous sauveraient la vie ! De grosses bottes fourrées bien chaudes, une combinaison intégrale à enfiler par dessus nos combinaisons de ski (n'ayons peur de rien) et d'énoooormes gants. Alléluia bis ! Cet accoutrement était aussi chaud et moelleux que ma couette. C'est revigorés que nous suivons dehors une jeune-femme-dont-je-n'ai-pas-retenu-le-prénom jusqu'à un traineau d'exposition, si je puis m'exprimer ainsi, afin qu'elle nous explique les bases de la conduite du traineau. Pas de rênes, les chiens se débrouillent tout seuls. Le traineau peut transporter deux personnes : le "passager", assis dedans, qui a interdiction de bouger sous risque de destabiliser le traineau, et le "conducteur", debout derrière, qui se tient avec les mains, et dont les pieds reposent sur deux.. euh.. décidément je manque de vocabulaire traineau-ien.. deux pales, on va dire. Au milieu des deux se trouve le frein : un plaque de metal avec des crampons sur laquelle il faut appuyer en cas de besoin. Une légère pression suffit pour ralentir, et pour s'arrêter, il faut l'écraser complètement. La jeune femme nous montre les signes "stop", "en avant", "ralentir" afin que tout se déroule au mieux.
Elle nous emmène ensuite à l'enclos des chiots. La ferme possède au total 160 huskies, il y a donc pas mal de naissances. Elle a commencé par quelques explications. Il existe deux types de huskies, les sibériens et les alaskiens. Ceux de la ferme sont des alaskiens. Je vous conseille un tour sur la page Wiki des huskies alaskiens, c'est vraiment intéressant. Après les explications, donc, place aux chiots que nous avons pu prendre dans nos bras et devant lesquels nous sommes bien sur devenus dégoulinants de gagaitude. Mais bon, ils étaient si mignons. Certains étaient si jeunes qu'ils tenaient dans une main. Bref, nous avions bien du mal à rester de marbre devant ces adorables petites peluches d'amour. (Et voilà, rien que d'y penser, je redeviens niaise.)
Le traineau.
Mais chaque chose a sa fin et il était temps pour un autre type de sensations. Place à la conduite de huskies. On nous attribue des traineaux - nous conduirons en file indienne. Alex et moi sommes dans le premier. N'ayant pas une pleine confiance dans mon habilité à gérer 5 chiens (ok, en vrai j'étais morte de trouille), Alex prendra le premier tour. Une fois tout le monde installé, c'est parti. Devant nous, une motoneige nous montre le chemin - enfin, le montre surtout aux chiens qui savent bien mieux comment faire que nous. Le départ fut.. fracassant ! Les chiens, dont la très petite taille m'a étonnée, sont très, très forts et surtout, extrêmement rapides ! Rien à voir avec le tour en renne de la veille, là il fallait s'accrocher ! Une fois les premières émotions passées, j'ai essayé de profiter de chaque micro-miette du paysage grandiose que j'avais sous les yeux - ça a du bon d'être en tête de file. De la neige partout, les arbres blancs, et l'horizon rose. C'était époustouflant. Et surtout, le calme, malgré la vitesse des chiens (et du traineau qui rebondissait à chaque trou..). Vraiment, c'était incroyable. Après qu'Alex a conduit une vingtaine de minutes, à mon tour. J'avoue que j'étais toujours autant morte de trouille. En fait être la seconde ne m'avait pas vraiment rassurée. Qu'importe, je prends place, Alex s'installe, et on repart. Bordel. Bordel bordel bordel. C'était dingue. Toujours ce paysage grandiose, iréel et féérique, toujours ce calme, mais cette fois je sentais vraiment la vitesse, il ne fallait surtout pas que je me déconcentre, car physiquement c'est assez dur, mais toutes les sensations étaient emplifiées. Mon visage était complètement gelés, ne parlons pas de mes cheveux, mon écharpe était un énorme glaçon, je ne pouvais pas ouvrir mes yeux en entier car mes cils ont gelé eux aussi, mais catin, j'avais l'impression d'être dans un autre monde, cette magnifique immensité silencieuse.. Là encore les mots sont faibles et les images rapportées minuscules, mais j'espère que vous ariverez à vous faire une idée.
Vue du traineau, photo d'Adrien.
Après ces émotions et de nouveau frigorifiés, nous retournons nous changer et en un claquement de doigts, nous voilà remontés dans le bus pour rentrer, sans vraiment avoir je crois réalisé ce que nous venions de faire et restant abasourdis de la beauté de ce que nous avions vu. Certains pouvaient s'ils le souhaitaient rester sur place et faire un tour en moto-neige (ici, en hiver, hors de question de penser scooter ou moto), mais personnellement j'ai un peu de mal avec le bruit et les gros moteurs dans ce genre de paysages, donc je suis rentrée. Après coup, je pense que j'aurais quand même adoré, mais tanpi !
Rentrés vers 13h, nous avions ensuite l'après midi de libre. Après midi passée au coin du feu (oui ! nous avions une cheminée !!), à profiter de l'ambiance cosy. Parce qu'être dans un petit chalet en Laponie, en plein hiver, quand il fait nuit noire à 13h, moins 30 dehors, et pouvoir se poser au chaud devant la cheminée, avec une tasse de thé, et après une telle matinée, et bien.. je crois qu'il n'y a rien de mieux.
Lundi soir, une soirée était organisée quelque part dans Saariselkä à partir de 23h. Les cinq autres occupants du chalet y sont allés, mais Alex et moi avons préféré rester posées là, asociables que nous sommes, et continuer à profiter de cette ambiance magique en dessinant nos futurs tatouages (papa, maman, désolée) et en jetant de temps en temps un oeil à la télé finlandaise. En effet, ici, tout ce qui passe à la télé est en VO, sous-titré en finnois, ce qui est, je trouve, remarquablement génial. En quelques chaines, nous sommes tombées sur une émission russe, un téléfilm américain, un vieux téléfilm québécois (souvenez-vous, tout est en VO...), une espèce de très vieille comédie musicale espagnole, et tout de même une émission finlandaise. Comme nous n'étions que toutes les deux, on en a profité pour faire le ménage complet du cottage puisque nous devions définitivement déguerpir le lendemain à 11h.
Inévitablement, mardi est finalement arrivé. A 11h nous étions tous les sept prêts à rendre les clés avant de charger nos valises dans le bus. Bus qui ne partirait qu'à 17h. La dernière après-midi s'offrait donc à nous. Nous sommes allés manger une pizza dans le centre, marcher un peu dans la neige, avons fait quelques courses pour le trajet, avant de nous poser dans un petit café super chouette, éclairé aux bougies, pour boire un dernier chocolat chaud en Laponie. A 17h, nous sommes montés dans le bus pour reprendre la route et sommes arrivée à Helsinki mercredi matin à 8h, après une pause à 20h, une pause à minuit, et une pause à 4h. (Ce que j'essaye de dire, c'est que je risque d'etre vraiment fâchée avec les trajets en bus maintenant. Mes genoux ne sont pas contents, et le retour m'a valu une deuxième nuit blanche. Mais au fond, qu'importe, ON S'EN FOUT J'AVAIS ETE EN LAPONIE.)
Maintenant, back to reality, Helsinki parait bien bondée et bien urbaine, un peu plus morose, retour au boulot.
M'enfin, quand même, j'ai adopté un petit renne doudou. Oui, je dors avec.. la Laponie m'a vraiment retourné le cerveau.
Je vous présente donc Oscar.